Notre-Dame de Paris, IV
Nous sommes en 1831. La cathédrale est une vieille dame fatiguée, blessée par les siècles. Il est envisagé de la démolir.
Mais un jeune écrivain, admirateur de ce monument pourtant marginalisé, décida qu'il était hors de question de laisser détruire un tel chef-d'oeuvre architectural. A travers le roman, il fit de cette ruine un édifice familier des Parisiens, créa un véritable engouement pour la vieille cathédrale.
Au point que plus personne n'envisagea sérieusement sa suppression...
Si Notre-Dame est encore debout aujourd'hui, c'est sans doute parce qu'un certain Victor Hugo a créé l'image du Bossu qui hante les tours et de la belle gitane sur le parvis...
C'était jusqu'alors l'architecte Godde qui était chargé de l'entretien. Mais personne ne voulant lui confier les travaux de restauration, on se tourna vers la jeune équipe de Jean-Baptiste Lassus et Eugène Viollet-le-Duc, qui s'étaient distingués lors de la restauration de la Sainte Chapelle.
En 1843 le chantier leur est confié, mais il faudra attendre 1845 pour que des fonds leurs soit alloués. On leur accorda à peu près l'équivalent de 25 millions d'euros, c'est-à-dire presque rien, vu l'ampleur des travaux nécessaires.
Les travaux s'arrêtèrent donc plusieurs fois, le temps que les architectes convainquent l'Assemblée Nationale de leur allouer davantage de moyens...
Jean-Baptiste Lassus décède en 1857, Eugène Viollet-de-Duc continue seul les travaux. La restauration fut terminée en 1864.
Les restaurateurs se sont efforcés de reconstruire à l'identique ce qu'il était possible de reconstruire. Malheureusement, dans la majorité des cas, il n'en restait plus de traces. Pour reconstituer l'ornementation sculpturale, Lassus et Viollet-le-Duc s'inspirèrent (voire copièrent) des oeuvres de la même époque et restées intactes (c'est-à-dire provenant des cathédrales d'Amiens, de Chartres et de Reims). Mais il y a une part d'invention...
Les sculpteurs furent réunis sous la direction de Adolphe-Victor Geoffroi-Dechaume. Aucune liberté de création ne leur était accordée, tout était dessiné au préalable par les architectes jusque dans les moindres détails.
En particulier les statues des douze apôtres qui entourent la nouvelle flèche, oeuvres de Geoffroi-Dechaume lui-même, furent particulièrement surveillées par Viollet-le-Duc.
Tous les apôtres regardent droit devant eux, sauf un tourné vers la flèche, saluant ceux qui ont eu l'autorisation exceptionnelle de monter jusque-là... Saint Thomas, patron des Architectes.
Est-ce un hasard s'il ressemble beaucoup à Viollet-le-Duc lui-même ?