Ca

Publié le par Harmonie

On ne comprend pas Ça. Ça n'est rien, on préfère l'ignorer.
On ne prête pas attention à Ça, on essaie d'y être indifférent. On fait comme si Ça n'existait pas.
Quand on passe devant Ça, on accélère, on presse le pas. Pas question de s'attarder devant Ça. On a les yeux vitreux, dans le vague, pour ne pas voir Ça.
Il n'est de pire sourd que celui qui ne veut pas entendre, de pire aveugle que celui qui ne veut pas voir. Et on est fort à ce jeu. On parvient à oublier Ça.
Mais Ça n'oublie pas. Ça bouge, Ça veut qu'on l'écoute, qu'on le regarde. Ça veut exister et on ne veut pas que Ça existe.
Parce qu'on a peur de Ça. On ne comprend pas Ça. On ne veut pas comprendre Ça.
Que Ça s'en aille, que Ça parte et qu'on soit tranquille. Mais Ça ne veut pas qu'on soit tranquille.
Ça veut qu'on réagisse. On est embêté par Ça. Ça veut provoquer de la colère. Créer de la rage.
Ça veut qu'on l'aime. Et on ne veut pas aimer Ça. Ça n'a aucune importance. Alors Ça est furieux. Ça veut faire mal, blesser, tuer. On est effrayé. On ne comprend pas. Ça est trop étrange. Alors on hait Ça.
On a peur de ce sentiment. Ça ne devrait pas exister. On en veut à Ça. Et on s'en veut d'en vouloir à Ça.
Mais pourquoi Ça reste ici ? Pourquoi Ça ne veut pas partir ? On ne veut pas que Ça soit là, pourquoi Ça s'entête ?
On était si bien avant. Pourquoi Ça est-il venu ? Ça a tout gâché.
Ça demande trop. Et on ne veut pas trop donner à Ça. Et surtout pas d'amour.
Donne ta main à Ça, Ça te prendra le bras.
Ça s'accroche. Ça ne veut pas lâcher prise. On est poursuivi par Ça. On sent que Ça épie, regarde, espionne.
On en a assez. Ça n'est qu'un voyeur, Ça n'est qu'un voyou. On en a marre de lutter contre Ça. On est défaitiste. De toute manière Ça s'entêtera.
Alors d'accord, Ça, tu as gagné : on t'aime.
Et maintenant, dégage.

Harmonie,
Ecrit le 31 mars et le 1 avril 2005 (j'ai les dates précises, pour celui-là).

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L
Le "ça" répété me fait vraiment penser à Perec... C'est une contrainte très amusante et dynamique pour le texte, que tu as trouvé là... :-)
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H
La contrainte était de n'utiliser que des indéfinis "on" et "ça". comme je ne pouvais pas les remplacer par d'autres pronoms, utiliser des adjectifs qui auraient permis d'apprendre si c'était masculin ou féminin, la répétition est venue d'elle-même.C'est très amusant d'écrire ainsi avec une contrainte en effet.
U
Ah ! Mais je ne m'enferme pas dans une seule voie d'intérprétation ! Bien au contraire !<br /> Cela était juste une façon amusée de répondre à antiochus...
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A
Il n'y a rien à pardonner ... Je comprends mieux ta réponse ... BIZ<br /> antiochus
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H
Ouf, me voilà soulagée :-)
A
Le "J'oubliais tu es psy" sonne comme un jugement péremptoirement négatif. La voie psychologique est aussi une voie de compréhension du monde (comme la philosophie, l'architecture et la poésie par exemple) et des humains dont il faut tenir compte, c'est une voie qui m'intéresse particulièrement mais ce n'est pas la seule et tu le sais puisque tu me fais l'amitié de visiter mon blog.
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H
Oh non, ce n'est pas du tout ce que je pensais ! J'aurais dû rajouter un sourire pour que tu ne l'interprètes pas ainsi... C'était juste une remarque amusée parce que quand j'ai écrit ce texte, je n'avais jamais lu Freud !Je suis d'accord, il s'agit d'une voie très intéressante et qui doit être passionnante à explorer.Encore désolée... Je suis pardonnée ?
U
le "ça" ? mmhh, oui je m'en vais replonger dans la lecture de métapsychologie de S. Freud, qui trône juste au dessus de ma tête en ce moment... Mais je ne sais même pas si le "ça" est abordé dans ce livre en fait. Je me sens un peu idiot là...<br /> <br /> Il faudra un jour que tu m'explique cette passion quasi Oulipienne pour les impersonnels et démonstratifs personnifiés.
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H
Tu n'es pas obligé de relire tout Freud... Mon prof d'écriture lui, y voyait une métaphore de la relation comédien/public. Donc là encore, ne t'enferme pas dans une seule voie d'interprétation.